Thomas Voeckler s’inquiète de l’hégémonie de Pogacar : « Admirable… mais ennuyeux »


Le débat n’est pas nouveau, mais lorsqu’il vient d’un homme qui a passé sa carrière au cœur du peloton, il prend une dimension particulière. Thomas Voeckler, aujourd’hui sélectionneur de l’équipe de France, a livré une analyse tranchante sur l’état actuel du cyclisme mondial. Pour lui, la domination écrasante de Tadej Pogacar étouffe le suspense, influence les stratégies des coureurs… et déséquilibre l’économie du sport.

Voeckler admire l’immense talent du Slovène, mais ne cache pas son malaise : « Pogacar est admirable, mais il ennuie », affirme-t-il, soulignant que sa supériorité réduit l’intérêt des courses. Lors des derniers Championnats d’Europe, le Français estime que le seul enjeu réel était la lutte pour la troisième place, tant la victoire semblait promise au leader de l’UAE Team Emirates.

Au-delà de l’athlète, Voeckler pointe surtout du doigt la puissance financière de l’équipe UAE. Un modèle économique à part, qui selon lui bouleverse le marché. « Quand une formation recrute les meilleurs jeunes, optimise tout grâce à des moyens énormes et joue dans une autre catégorie que les équipes soutenues par des sponsors traditionnels, cela finit par déstabiliser tout le peloton », observe-t-il.
Résultat : les budgets explosent, les salaires s’envolent et nombre de structures ne peuvent plus suivre. « Pour rester dans le top 10 du World Tour, il faut désormais des revenus deux fois supérieurs à ceux d’il y a cinq ans. Ce modèle n’est pas soutenable », prévient l’ancien champion.

Face à cette dérive, Voeckler évoque la possibilité d’un plafond salarial, sans grande illusion : même les sports qui l'ont instauré contournent les règles via des mécanismes contractuels sophistiqués. S'il n’existe pas de solution simple, il redoute des conséquences claires : une concentration des victoires entre quelques coureurs et des courses de moins en moins disputées par les leaders, hormis le Tour de France où leur présence est incontournable.

Le Français garde néanmoins un espoir pour 2026 : que le suspense revienne et qu’un coureur soit enfin capable de contester la domination de Pogacar. « Je l’adore, mais quand il est au départ, le suspense disparaît. Cela pousse même certains à éviter les courses », regrette Voeckler, qui rêve de voir un Français capable de rivaliser tant que le maître slovène continuera d’écrire sa légende.